Essai sur la Charia
=====================================
1. La
charia, c’est quoi ?
2. Les mouvements intégristes et la charia
3. Les
dangers de l’application de la Charia
4. Le
modèle turc, un leurre intégriste !
=====================================
1.
La charia, c’est quoi ?
La
charia n'est pas un code, comme par exemple le code Napoléon en France. Ce sont
des interprétations juridiques et éthiques, souvent divergentes, qu'au cours
des siècles les théologiens ont données (et continuent de donner) des Écritures
sacrées islamiques : le Coran et la Sunna.
Si nous considérons la constitution historique
de la charia islamique, nous nous rendons compte qu’elle s’inscrit dans toute
une évolution historique. Le Coran, autorité suprême en matière religieuse, ne
constitue pas vraiment un texte législatif. Sur les quelque 6.218 versets qui
le composent, 500 environ concernent la vie sociale, et 80 sont suffisamment
précis pour fonder des règles juridiques concernant le culte (jeûne,
pureté rituelle, interdits alimentaires), les mariages et les divorces, les
successions et les tutelles des orphelins, la punition du vol ou de
l’adultère…Cela est restreint. Le terme précis de charia n’apparaît d’ailleurs
qu’une seule fois dans le texte coranique : « Nous t’avons mis sur
une voie (sharî‘a)
selon un ordre ; suis-la, et ne suis pas les passions désordonnées
de ceux qui ne savent pas » (XLV 18). Ce verset fait l’objet d’interprétations
tendancieuses de la part des exégètes des courants intégristes qui font croire
aux plus naïfs qu’il est nécessaire d’appliquer la charia comme code divin, ou
cadre juridique complet, alors que le verset coranique parle au prophète de
voie à suivre et non de code juridique à appliquer.
Le Livre
saint, bien que rempli de directives morales et éducatives, ne fournit guère
d’éléments pour la constitution d’un cadre juridique complet. Il n’est ni un
code ni une Constitution. C’est un appel à tous les hommes, partout sur terre,
où qu’ils soient, pour que chacun
d’entre eux cherche individuellement son salut, indépendamment du régime sous
lequel il vit. Il garantit à tous les hommes la liberté de conscience : « Pas de contrainte en matière de
religion »
Quant à
la Sunna, le deuxième pilier de la charia, c’est l’ensemble des hadiths, attribués
au Prophète, dont le nombre est impressionnant (entre 750 000 et 1 million
selon les sources, mais à peine quelques milliers ont été sélectionnés pour
servir de fondement à la charia). Tout le monde sait bien, musulmans compris,
que la plupart des hadiths sont apocryphes. La preuve, plus de 98% parmi ces
hadiths ont été rejetés par les exégètes. Si la plupart se réfèrent à des faits
à caractère religieux et social qui seraient advenus à l’époque où le Prophète
exerçait des fonctions de chef temporel et spirituel, d’aucuns sont tout à fait
anecdotiques. L’authenticité des faits et gestes attribués au Prophète est très
souvent contestable. Les historiens ont par exemple établi que certains propos
censés venir de la bouche de Mohammed avaient été inventés de toutes pièces
pour soutenir telle ou telle position dans les batailles idéologiques ou
politiques d’une époque ou l’autre.
La
charia en tant que concept, fait l’objet de controverses. Outre la polygamie et
le port du voile, l’aspect le plus controversé du droit islamique est celui des
châtiments corporels (hudud). Certains sont d’essence coranique. Il s’agit
notamment de la peine de mort qui sanctionne le meurtre, de l’amputation de la
main du voleur et des coups de fouet pour certains actes considérés comme
délictueux. La lapidation, elle, n’est pas dans le Coran, où seul Satan (Iblis)
est lapidé. Elle a été introduite sous l’influence de la religion judaïque. Pour
ce qui est de la peine de mort infligée à l’apostat, celui qui renie l’islam,
elle n’a pas non plus de fondement dans le Livre saint. Celui-ci proclame sans
équivoque qu’il n’y a pas de contrainte en religion. » ; « Ô vous croyants ! Occupez-vous de vos affaires. Ne vous porte
aucun préjudice celui qui s’égare, si vous êtes sur la bonne voie » ; « Si ton Seigneur l’avait voulu, Il
aurait fait de tous les hommes une communauté unique. Or, ils ne cesseront
jamais de vivre dans la diversité. »
Quant à
la Constitution de Médine négociée par le Prophète en l’an 1 de l’hégire,
entre toutes les composantes sociales de la cité-État, polythéistes, juifs et
musulmans, elle ne constitue pas un argument en faveur des intégristes qui
prétendent que les pouvoir spirituel et temporel n’ont jamais été dissociés en
Islam. Dans ses 47 articles, il n’est nulle part question d’une religion
de l’État. On peut dire qu’il s’agissait d’une Constitution plutôt laïque.
Le
premier traité consacré à la charia est le Kitâb al-Umm, de Shâfi’î, mort en
804. Auparavant, soit près de deux siècles durant, les musulmans avaient vécu
sans charia. Ils pourraient donc s’en passer de nouveau, et s’en porteraient
d’autant mieux que sous les pesanteurs de l’Histoire, par le hukm al-ridda (la
loi sur l’apostasie), inexistant dans le Coran, la charia a pris une forme
terrorisante, incompatible avec la liberté et la démocratie. Sans
charia tout le monde se porterait mieux.
2. Les mouvements intégristes et la charia
Ce sont les
mouvements intégristes de tous bords, (wahhabites, frères musulmans, autres
sectes dérivés de ces deux courants) qui
veulent imposer la charia, ce qui est de nature à ouvrir la voie à la
domination politique d’un clergé musulman qui ne veut pas dire son nom, parce
que l’Islam en tant que religion est contre le cléricalisme, d’où la naissance
de l’islamisme qui est un courant idéologique, issu de l’Islam.
L'islamisme et
la démocratie sont totalement inconciliables. Pour l'islamiste, le législateur,
c'est Dieu. Et c'est tout. Pour un démocrate, la souveraineté appartient au
peuple. L'un dit : la souveraineté est transcendantale ; l'autre dit : elle est
horizontale. Il y aura toujours cette pierre d'achoppement qu'est la charia. Même s'ils
mettent une sourdine à l'application des hudud, les peines mutilantes, pour des
considérations tactiques, les intégristes ne renonceront jamais à la charia,
parce que dans ce cas là, ils devraient déclarer solennellement que les hudud sont obsolètes, ce qu’ils ne feront
jamais.
Les intégristes peuvent
par taqiyya, dissimulation tactique, temporiser. La charia les y autorise.
Chiites, sunnites ou kharidjites se sont tous ménagé un tel refuge. Mais, sur
le plan doctrinal, ils ne renoncent jamais.
Si on demande à un islamiste : est-ce que, oui
ou non, vous pensez que la sunna a force de loi ? Et que le hadith est
authentique ? Et lorsqu'il commence à louvoyer, on lui présente le hadith suivant
: "Quiconque change sa religion, tuez-le !" Est-il authentique ou non
? Il répondra qu'il est authentique, alors qu’il est contredit par le Coran qui
stipule que ceux qui changent de religion seront jugés dans l’au-delà et non
pas ici-bas.
Les intégristes,
parce qu’ils sont des adeptes de la terreur, optent naturellement pour toutes
les interprétations rigoristes de l’Islam qui leur assurent la main-mise sur le
dispositif législatif, au nom de Dieu !
Les mouvements intégristes s’opposent aux régimes
dictatoriaux, en apparence, au même titre que les opposants laïques, mais c’est
une lutte pour le pouvoir, pour le contrôle des esprits et non pour leur
libération. Les intégristes rejettent ces régimes parce qu’« ils sont impies »,
« n’appliquent pas la charia », et
non parce qu’ils sont anti-démocrates et anti-populaires. La critique des
gouvernants, est une critique de leur
légitimité religieuse. Elle n’a pas pour point de départ les droits humains
mais les droits divins.
Selon un dicton arabe,
deux singes ne peuvent pas jouer sur une même corde. C’est une bonne description
de la lutte entre ces deux singes que sont les régimes de dictature
arabo-musulmans et les mouvements intégristes. Cette lutte explique la
transformation de la religion, dans ses manifestations populaires, en quelque
chose de complètement hideux. La religion a toujours eu une forte dimension
spirituelle et éthique. Elle s’est muée en une somme de rituels et, surtout, en
une haine féroce de l’autre. L’autre, d’ailleurs, n’est plus seulement le
chrétien, ou le juif. C’est aussi maintenant le musulman non pratiquant ou le
musulman ayant une autre interprétation des textes sacrés !
Historiquement,
les mouvements intégristes ont appauvri la pensée islamique et l’ont réduite à
des rites contraignants en évacuant toute tentative de réflexion philosophique. Aujourd’hui, cet
appauvrissement s’est aggravé. La pensée religieuse qui émerge de l’islam aujourd’hui
est dans un état profond d’appauvrissement, dans le sens où aujourd’hui nous en
sommes arrivés à des questions telles que la fatwa sur l’allaitement
d’adultes – et cela n’a pas été délivré par n’importe quel cheikh ordinaire,
mais par le chef du département des Hadith de l’Université Al-Azhar.
Il
y a pire. Certaines opinions, dans l’islam fondamentaliste, rejettent
complètement la science moderne, l’Occident, et tout ce qu’il produit. Si vous
poussez leur réflexion à sa conclusion logique, ils deviendront comme les
Talibans sur ces questions.
Ils
abordent les problèmes de façon dogmatique. Par exemple, dans une des fatwas
Khuomeiny, parle d’un éventuel voyage d’un musulman dans une capsule spatiale.
Il discute de la façon dont il doit prier, et comment il devrait déterminer la
direction pour prier dans l’espace. Bien sûr, dans l’espace il n’y a pas de
nord ou de sud, et les capsules spatiales orbitent à grande vitesse le long
d’un cours fixe. De même, quand un musulman atteint l’espace, il y va dans une
capsule spatiale russe ou américaine, dans la mesure où il n’existe aucune
capsule arabe ou musulmane.
Le
problème est que Khomeiny n’était familier avec aucune des réalisations des
sciences, de la technologie ou des connaissances relatives à l’espace. Tout ce
qui l’intéressait c’était de savoir comment un musulman doit se prosterner et
prier, et comment il devrait jeûner quand il reste là pour une longue période
de temps. Après cette discussion, Khomeiny est arrivé à la conclusion
d’autoriser un musulman à prier dans l’une des quatre directions. De toute
évidence, ce mode de pensée trahit son ignorance complète, car les directions
sont une convention, il n’y a pas quatre directions dans la nature.
Les
intégristes de tous bords sont opposés à des questions comme les bébés
éprouvettes, ou aux innovations, par exemple dans le domaine du code génétique
(ADN), des reproductions génétiques ainsi que d’autres percées et découvertes
scientifiques. Ils n’ont aucune connaissance de la nature de ces sciences,
comment les scientifiques y sont arrivés, et quelles sont les expériences qui
les ont précédées. Ils n’ont aucune culture scientifique et ils sont radicaux
dans ce domaine. Il en est ainsi pour les chiites, mais il existe des exemples
aussi chez les sunnites, comme le cheikh Abd Al-Aziz ibn Baz, l’érudit
religieux d’Arabie saoudite.
Le
Mufti saoudien Abd Al-Aziz Ibn Baz a déclaré que la terre est plate et que tous
ceux qui disent que la terre est ronde et qu’elle tourne en orbite autour du
soleil sont des apostats. Donc, ils doivent être tués !!!Selon cette
conception, c’est plutôt le soleil qui
fait le tour de la terre. Il
nous fait revenir à l’astronomie ancienne, à la période pré copernicienne. Mais
la grande catastrophe c’est que pas un seul des religieux ou des institutions
universitaires dans le monde musulman, de l’Orient à l’Occident, de Al-Azhar à
Al-Zaytouna, de Al-Qaradhawi à Al-Tourabi et des départements d’étude de la
charia – pas un seul n’a osé dire à Ibn Baz à quel non-sens il s’accroche au
nom de la religion islamique.
Les
fonctionnaires des institutions religieuses, d’abord et avant tout Al-Azhar,
les facultés de la charia, les départements de décrets religieux, et ainsi de
suite sont dans un état de complète stérilité intellectuelle. Ils ne produisent
rien sauf des décisions comme celle de l’allaitement maternel des adultes, la
bénédiction avec l’urine de Mahomet, et la flagellation des journalistes.
3. Les dangers
de l’application de la Charia
L’idéologie
joue un rôle important dans la croyance et le comportement des mouvements
intégristes. Ils estiment qu’il est nécessaire que le règne de l’islam revienne
dans les états arabes et musulmans comme il l’était au commencement. Après
cela, ils veulent étendre le règne islamique sur le monde. Cette motivation est
plus forte pour eux que les bases militaires américaines ou britanniques dans
le monde arabe ou que la lutte contre le sous développement de leurs pays.
Quant
à la compréhension qu’ont ces mouvements de l’application de la charia, elle
pourrait se résumer au code pénal, soit la flagellation, la lapidation,
l’amputation des mains et des pieds, la décapitation et ainsi de suite
Appliquer
la charia cela signifie que vous imposerez l’impôt jizya aux chrétiens. Dans des
pays arabes, l’Égypte et la Syrie par exemple, il y a des chrétiens qui furent
martyrisés dans la lutte contre Israël. Que leur arrivera-t-il si nous mettons
en place la charia? Seraient-ils considérés comme des martyrs ou non? Par
ailleurs, l’ancien chef suprême des Frères musulmans en Égypte a explicitement
demandé d’exclure les chrétiens de l’armée égyptienne au motif qu’ils sont des
dhimmis.
D’autre
part, lorsque la majorité sunnite établit un parti religieux sur une base
sectaire, elle devient un exemple et encourage le reste des sectes à former
leurs propres partis sur des bases religieuses contradictoires. Par conséquent,
l’idée de former des partis sectaires sur une base religieuse contribue à
l’effondrement de l’idée de citoyenneté. Ce n’est pas moins dangereux que de
former un parti sur une base raciale, comme en Allemagne par exemple, car cela
signifie un retour au nazisme.
La Charia
institue une discrimination institutionnelle : qui n’est pas musulman est
traité comme un être inférieur, méprisable. Ainsi il existe des gens qui ne
sont pas égaux en raison de leurs croyances : il s’agit là d’une
discrimination. Nous sommes en présence d’une véritable forme de « racisme
confessionnel ».
4. Le modèle turc, un leurre
intégriste !
Certains
intégristes louvoient en faisant croire qu’ils sont sur la voie de l’expérience
turque. Qu’en est-il en fait ?
L’expérience
turque est un exemple très important. Toutefois, en dehors de la Turquie, les
partis avec un caractère religieux considèrent que leur tâche est de
ré-islamiser la société.
Et s’ils prenaient le pouvoir – que ce soit par le biais
d’élections ou d’un coup d’état – ils s’y accrocheraient en vue de mener à bien
cette tâche. Leurs paroles sur le transfert pacifique et régulier du pouvoir
sont tactiques et hypocrites, et on ne doit leur accorder aucun crédit.
La
Turquie est le seul pays musulman fondé sur la laïcité en tant qu’idéologie et
conviction. Au début de la République turque, on a déclaré qu’il s’agissait
d’une république laïque, ce qui signifie qu’elle est religieusement neutre.
C’est également le seul pays qui a créé un parti avec des fondements
islamiques, mais qui est aussi démocratique et capable d’atteindre le pouvoir
par des élections régulières, et de gouverner sans pour autant mener l’État
vers la catastrophe.
Sans
la laïcité de la Turquie, l’idée d’islamistes alternant au pouvoir avec
d’autres partis serait impossible. La condition préalable qui a permis à la
Turquie de produire le Parti justice et développement est qu’elle soit un État
dont les racines sont laïques. Cela n’existe dans aucun autre pays arabe.
Lorsque
nous regardons simplement le monde arabe, nous voyons qu’il est dominé par
l’islamisme wahhabite et frère musulman qui sont des mouvements intégristes
radicaux qui n’ont aucune conscience de l’état de sous développement où ce
monde baigne
Le
monde arabe consomme tout, mais ne
produit rien en dehors des matières premières. Que pouvons-nous attendre des
Arabes sous le règne des wahhabites et des frères musulmans? Regardez le monde
arabe d’un bout à l’autre; il n’existe pas de véritable valeur ajoutée à quoi
que ce soit. Il y a une structure qui semble ne pas encourager la production et
ne pas être en sa faveur. Qu’est-ce que nous produisons? Qu’est-ce que nous
exportons?
Quelle
est la relation des Arabes avec l’industrie pétrolière? Ils sont propriétaires
du pétrole, mais ils n’ont rien à voir avec son extraction, son raffinement, sa
commercialisation et son transport. Regardez les énormes installations pour la
prospection du pétrole, son extraction, et son raffinage. Regardez les
satellites des pays arabes, ils n’ont aucun contenu arabe. Je doute de la
capacité des Arabes à produire un téléphone sans importer les pièces et les
technologies dont ils ont besoin, et peut-être même les techniciens.
Il
est difficile pour la mentalité arabe dans sa structure actuelle de produire la
démocratie, mais cette mentalité n’est pas un attribut fixé pour l’éternité. On
pourrait accepter un modèle ayant un succès de 30 pour cent, mais jusqu’à
maintenant nous souffrons pour l’accomplir. Il est hors question que les
mouvements intégristes arabes suivent le modèle turc. Leur modèle suprême,
c’est le régime wahhabite en Arabie Saoudite ou le régime talibanesque en
Afghanistan !
Il
y a une démocratie sectaire au Liban, il s’agit d’un régime de quotas, et non
d’une démocratie fondée sur la citoyenneté. Le régime politique au Liban empêche
une dictature par le biais d’équilibres sectaires, mais il n’a pas accompli une
véritable démocratie fondée sur la citoyenneté. L’Irak va dans le même sens. En
Egypte, le mouvement démocratique est pris en tenaille entre les intégristes et
l’armée. En Libye, l’intégrisme a complètement disloqué l’unité du pays. En
Tunisie, le mouvement démocratique se bat avec acharnement contre les
différentes factions intégristes pour instaurer des traditions démocratiques
dans le pays
Les
intégristes interprètent la démocratie à leur manière. Ils disent : Nous
sommes la majorité et donc nous gouvernerons, et la démocratie c’est la règle
de la majorité, et vous n’avez qu’à nous laisser gouverner, mais ils s’écartent
de la vérité. En
fait, la démocratie c’est la règle de la majorité et la protection des droits
des minorités ; c’est surtout l’alternance au pouvoir que les intégristes
n’acceptent pas en fait. Avec cette conception tronquée de la démocratie,
l’État devra faire face à la division, à la guerre civile et à la ruine.
Depuis le ixe
siècle, les ordres juridiques des différents états musulmans se sont
considérablement modifiés. Une partie du domaine des activités humaines échappa
à la compétence du droit religieux : ainsi le droit commercial, la
fiscalité, le droit de la
guerre. Le droit pénal est le plus souvent réformé – on ne
coupe plus, sauf dans des cas rares, la main des voleurs. Les citoyens non
musulmans (chrétiens ou juifs) jouissent d’un statut égal, le statut ancien
prévu par le verset coranique IX 29 n’est plus appliqué. Que recouvre alors la
charia de nos jours ? Le domaine principal où elle reste appliquée est
celui du droit de la
famille. Dans la plupart des pays musulmans, le mariage est
régi par la charia. Le
mariage d’une femme musulmane avec un non musulman reste prohibé. Il est
exceptionnel que la polygamie soit explicitement interdite - comme elle l’est
dans des pays comme la Turquie ou la Tunisie - même si les familles polygames
sont extrêmement rares. Pour les mêmes raisons, l’héritage reste inégalitaire,
les sœurs héritant la moitié de ce qu’héritent leurs frères.
De nos jours, la
référence à la charia représente souvent une position, un marquage avant tout
idéologique. Il s’annonce comme une affirmation d’identité, par exemple quand
la constitution d’un État promulgue la charia comme référence suprême. En fait,
la charia au sens classique du terme n’est intégralement appliquée que dans une
minorité de sociétés, comme en Arabie Saoudite ou en Afghanistan. Plusieurs
états s’affichent officiellement comme « République islamique », mais
leur législation est en fait largement occidentalisée. L’accent mis sur des
détails matériels (prohibition de l’alcool, imposition de vêtements féminins)
vient souvent masquer la modernisation effective des autres domaines de
régulation sociale.
Ce serait
cependant une erreur que de minimiser la référence à la charia dans l’attitude des
groupes intégristes qui en font leur cheval de bataille pour la domination des
esprits et des sociétés où ils s’activent. Le combat que mènent ces groupes
pour l’imposition de la charia n’est pas un combat pour le triomphe des idéaux
de l’islam, mais pour le contrôle des sociétés et l’imposition d’un régime de
dictature humaine au nom du droit divin. De même, la lutte de tous les
démocrates et des défenseurs des droits de l’homme contre l’application de la
charia n’est pas une lutte contre l’Islam comme une religion, mais contre les
groupes intégristes et le régime dictatorial qu’ils veulent imposer.
Parti Tunisie Verte (PTV)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire